Analyse du SCALP/No Pasaran sur la LRU et au-delà
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Analyse du SCALP/No Pasaran sur la LRU et au-delà
Contre le formatage néolibéral des facs, autogestion universitaire et
révolution sociale !
Depuis la rentrée universitaire, des étudiant-e-s, des enseignant-e-s et
des BIATOSS (bibliothécaires, ingénieur-e-s, administratifs/ves,
technicien-ne-s, ouvrier-e-s, de service et de santé) ont décidé de lutter
pour l'abrogation de la « Loi relative aux Libertés et Responsabilités des
Universités » (LRU), dite loi Pécresse, que le gouvernement Sarko/Fillon a
fait voter en douce cet été. Comme en 1986 (loi Devaquet), la droite
profite d'un succès électoral pour lancer une grande offensive contre les
universités. Son but : faire se plier l'enseignement supérieur et la
recherche à une idéologie centrée sur l'autoritarisme et la recherche de
profit financier. Nous pensons que cet acharnement prouve qu'il n'est plus
possible de s'en tenir à des luttes ponctuelles, certes nécessaires,
contre telle ou telle loi imposée par les partis de gouvernement. Si l'on
veut contrer leur volonté de soumission totale des universités aux
logiques du capitalisme, il faut leur opposer une pratique et un projet
qui rompent avec l'organisation actuelle de la recherche et de
l'enseignement. Le réseau No Pasaran, dans tous ses combats, a toujours
refusé de s'en tenir aux dénonciations creuses des adversaires, au profit
de pratiques de résistance et de construction d'alternatives. Nous
proposons donc ce texte au mouvement, pour qu'un débat s'ouvre sur
l'université que nous voulons vraiment.
La loi LRU : une « gouvernance » autoritaire inspirée du management.
Beaucoup de choses sont dites sur la loi Pécresse, dont pas mal
d'approximations. Ce qui est certain, c'est que cette loi modifie en
profondeur les rapports de force au sein des universités, en dotant un
Conseil d'Administration (CA) réduit et un président rééligible d’un
ensemble de pouvoirs nouveaux, au détriment des départements, des UFR et
des autres conseils : Conseil des Etudes et de la Vie Universitaire (CEVU)
et Conseil Scientifique (CS). Certains de ces pouvoirs, notamment la
possibilité pour le/a président-e d’intervenir directement dans le
recrutement et la rémunération des enseignant-e-s chercheur-e-s,
organisent la compétition interne et le clientélisme, limitant à terme les
possibilités de voix discordantes au sein des facs. Cette logique n’est
pas nouvelle : c’est celle qui prévaut dans les entreprises capitalistes,
et que les gouvernements successifs, de droite comme de gauche, veulent
importer dans les administrations publiques. Cela va évidemment avec
l'augmentation de la précarité des personnels, qui pourront être
recruté-e-s sur des contrats courts par le/a président-e de l'université,
et avec l'apparition de fonctions dont on voit mal comment elles cadrent
avec les missions universitaires, par exemple la gestion d'un portefeuille
de valeurs mobilières et immobilières. Ce qui nous est vendu comme de
l'autonomie est en fait le passage à une « gouvernance » autoritaire de
nos facs, calquée sur le fonctionnement des entreprises capitalistes.
Contre la présidentialisation, autogestion interprofessionnelle.
Evidemment, voir les universités dirigées par des président-e-s/PDG est
une perspective peu ragoûtante. Mais pour faire pièce à cette logique
autoritaire, l'abrogation de la loi LRU n’est pas suffisante :
aujourd’hui la capacité des étudiant-e-s, enseignant-e-s et BIATOSS de
contrôle et de participation directe au fonctionnement de l’université
est ridiculement faible. Les élections des conseils permettent, sous
prétexte d’investir de supposé-e-s représentant-e-s, d’en exclure
l’immense majorité des usager-e-s. Au contraire, nous voulons une
organisation autogestionnaire et interprofessionnelle de l’université, à
tous les niveaux, et le remplacement d’un système fondé sur la
représentation par une participation directe des usager-e-s à toutes les
décisions qui les concernent.
LRU, LMD, ECTS, PRES : les logiques du processus de Bologne.
Cette loi prend place dans un processus de plus long terme (dit de
Bologne), lancé en 1998 par Claude Allègre et touchant aujourd’hui 45
pays. Celui-ci poursuit deux objectifs : d’une part créer un espace
européen d’enseignement supérieur harmonisé et compétitif, et d’autre
part instaurer partout une séparation entre cursus professionnalisants et
parcours plus longs. Selon l'idéologie de Bologne, les universités –
réunies dans des « pôles d'excellence » comme les Pôles de Recherche et
d'Enseignement Supérieur (PRES) – devraient devenir des unités
économiques en compétition pour attirer des « cerveaux », et façonnées
pour fournir aux entreprises capitalistes une main d'œuvre «
professionnalisée » et corvéable à merci. Là encore, les logiques
néolibérales prévalent : soumission interne aux mécanismes du marché,
soumission externe au « marché de l’emploi », c'est-à-dire aux intérêts
des capitalistes et du patronat. Comme dans le reste du système
capitaliste/étatique, cette transformation est soutenue par un contrôle
toujours plus important de l’Etat, qui distribue les crédits et les
habilitations en fonction de la soumission à cette idéologie de chaque
université, UFR, département.
Contre la compétition organisée, coopération fédéraliste internationale.
La présentation selon laquelle les établissements d’enseignement
supérieur seraient inéluctablement en compétition relève d’un mode de
pensée néolibéral particulièrement inadapté à l’université que nous
voulons. Les universités devraient être des lieux ouverts à tou-te-s et
dans lesquels connaissances et compétences seraient librement construites
et partagées. Mais il ne faut pas s’y tromper : cette idéologie s’impose
aujourd’hui parce que les universités se pensent et se vivent trop
souvent comme des unités fermées, peu liées entre elles et peu réflexives
sur leur place dans la société. Il est nécessaire de s’opposer à l’idée
de compétition non en renforçant cette fermeture, mais par la mise en
place d’outils concrets de coordination entre universités (pour la
recherche comme pour l’enseignement), selon des principes fédéralistes,
et d’ouverture aux mondes extérieurs qui fonctionnent selon des modes
d’organisation et des valeurs non-capitalistes : mouvements sociaux,
services publics, milieux alternatifs. C'est seulement ainsi que
l'ouverture des universités, tant réclamée par les un-e-s et les autres,
pourra prendre un sens réellement émancipateur pour ses usager-e-s.
Autonomie, pouvoir des entreprises, pouvoir de l’Etat.
La dénonciation habituelle de désengagement de l’Etat est trompeuse :
l’Etat est au contraire plus intrusif que jamais. Par les réformes
Licence/Master/Doctorat (LMD) et le contrôle des maquettes, c'est-à-dire
des enseignement proposés aux étudiant-e-s, l'Etat tente de formater tous
les cursus ; par la création de l’Agence Nationale de la Recherche (ANR)
et le démantèlement progressif du Centre National de la Recherche
Scientifique (CNRS), il soumet les chercheur-e-s à des priorités définies
nationalement par des personnes nommées par le gouvernement, et augmente
la précarité et la compétition entre chercheur-e-s. Quant au contrôle
direct des entreprises sur les universités, c’est une hypothèse peu
probable : l’existence en France d’un enseignement supérieur divisé entre
université et grandes écoles fait que les facs ne risquent pas d’attirer
les fonds du CAC 40. Mais c'est un risque toujours présent, et que la loi
Précresse accentue. Le problème est qu'aujourd'hui il est nécessaire de
se battre à la fois contre les tentatives étatiques et capitalistes de
soumettre les universités à leur volonté. Ce combat est d'autant plus
difficile qu'aujourd'hui l'Etat montre clairement qu'il soutient les
intérêts des firmes capitalistes contre ceux des travailleurs/euses, à
l'université comme dans le reste de la société.
Contre la tutelle de l’Etat et la mainmise du capital, service social de
l’enseignement.
L’alternative qu’on nous présente entre financement par l’Etat et
financement privé est aveuglante, au point d'amener le mouvement contre
la loi LRU à en appeler à l’Etat pour nous protéger des entreprises. Mais
de la même manière qu’il serait illusoire de penser que les capitalistes
pourraient nous filer de l’argent sans rien demander en échange, il est
singulièrement naïf de croire en une université libre financée par un
Etat toujours plus autoritaire et intrusif. Ce débat dissimule tous les
autres modes de financement public, en vigueur par exemple dans les
systèmes d’assurance sociale comme la Sécu, et qui permettent une gestion
par les personnes concernées (malheureusement pas toutes, et selon une
répartition inéquitable des pouvoirs entre « partenaires sociaux », dans
la Sécurité sociale actuelle). Pour réaliser l’autogestion et faire du
système d’enseignement supérieur et de recherche un outil de
transformation sociale, et non plus le bras intellectuel d'un Etat
décidemment engagé au côté des capitalistes et du patronat, il est
impératif de creuser dans cette voie et de réfléchir ensemble à un projet
de financement exclusivement public et entièrement indépendant de
l'ingérence étatique (mutualisme, cotisations sociales etc).
Les universités dans le système d’enseignement supérieur français et
européen.
La lutte pour la définition de l’avenir du système d’enseignement
supérieur et de recherche dépasse les frontières de l’université. Si le
processus de Bologne aboutit effectivement à un système universitaire à
deux vitesses, l’enseignement supérieur français est déjà fortement
cloisonné : les classes prépas et les grandes écoles sont aujourd'hui les
lieux quasi-exclusifs de formation des futures élites de l’Etat et du
capitalisme. Au niveau européen, la mobilité voulue par Bologne est là
aussi un outil à la disposition exclusive des étudiant-e-s les mieux
doté-e-s économiquement, socialement, culturellement. Et la machine à
exclure ne commence pas après le baccalauréat : dès le collège, le
système de reproduction et de légitimation de la hiérarchie sociale
élimine par étape les futur-e-s exploité-e-s de la compétition pour les
meilleures places d’exploiteurs/ses. Il faut donc se battre sans relâche
contre toutes les formes de hiérarchisation des cursus, du primaire au
supérieur.
Contre les boîtes à élites, enseignement polytechnique pour tou-te-s.
Les universités sont aujourd'hui insérées dans un système d'enseignement
supérieur qui les relègue à une position subalterne : sous-financement
chronique, masse d'étudiant-e-s dépossédé-e-s de tout contrôle de leur
cursus, diplômes dévalorisés par les recruteurs/euses des firmes
capitalistes. C'est pourquoi il est nécessaire de poser les bases d’une
lutte contre la coexistence des facs et de filières sélectives dans
lesquelles l’immense majorité des dirigeant-e-s seront recruté-e-s. Mais
cette lutte, pour ne pas être vaine, doit permettre de récupérer des
prépas et des grandes écoles les dispositifs qui font leur intérêt et
leur force : beaucoup de moyens matériels et un haut taux d’encadrement,
une pluridisciplinarité durant les deux années qui suivent le bac, etc.
La professionnalisation qu’on tente de nous vendre est démentie par le
généralisme du cursus des élites : à nous d’inventer, par un enseignement
polytechnique pour tou-te-s pendant les premières années de formation,
les moyens de dépasser la ségrégation intellectuels/manuels si centrale
au système de domination économique. L’université que nous voulons,
ouverte à tou-te-s, quel que soit l’âge, la position sociale, le parcours
précédent, est possible si l’on se débarrasse du système intrinsèquement
hiérarchique des prépas/grandes écoles.
Révolution universitaire et révolution sociale.
Non, le combat actuel des étudiant-e-s, enseignant-e-s et BIATOSS n'est
pas perdu d'avance, si l'on évite les pièges tendus par le gouvernement.
S'en tenir à des revendications limitées aux réformes en cours, c'est se
condamner à les subir, sous des formes au mieux diluées, dans les années
à venir, et à s'interdire de devenir les acteurs/trices d'un changement
radical et émancipateur du fonctionnement des universités. C'est
seulement en mettant en place, dans toutes les facs, des espaces de
construction de l'autogestion, que l'on pourra imposer l'université que
nous voulons, débarrassée de la tutelle du gouvernement et des
entreprises capitalistes. Expérimenter, dès aujourd'hui, une nouvelle
manière de vivre ensemble dans les facs, c'est participer à la
construction de la nécessaire rupture avec le capitalisme et
l’autoritarisme. Cette rupture ne commence ni ne finit dans les
universités elles-mêmes : elle passe par le développement dans toute la
société de services publics gratuits et autogérés, permettant à chacun-e
de se voir garantir les moyens de mener une vie librement choisie dans
des conditions décentes. Mais en tant qu’espaces propices au
développement de logiques non-marchandes, les facs ont un rôle à jouer :
au mouvement actuel de se les approprier, et d’en faire les lieux de vie
et de lutte qu’elles peuvent et qu’elles doivent être, pour participer à
la construction d’une véritable révolution sociale et libertaire !
révolution sociale !
Depuis la rentrée universitaire, des étudiant-e-s, des enseignant-e-s et
des BIATOSS (bibliothécaires, ingénieur-e-s, administratifs/ves,
technicien-ne-s, ouvrier-e-s, de service et de santé) ont décidé de lutter
pour l'abrogation de la « Loi relative aux Libertés et Responsabilités des
Universités » (LRU), dite loi Pécresse, que le gouvernement Sarko/Fillon a
fait voter en douce cet été. Comme en 1986 (loi Devaquet), la droite
profite d'un succès électoral pour lancer une grande offensive contre les
universités. Son but : faire se plier l'enseignement supérieur et la
recherche à une idéologie centrée sur l'autoritarisme et la recherche de
profit financier. Nous pensons que cet acharnement prouve qu'il n'est plus
possible de s'en tenir à des luttes ponctuelles, certes nécessaires,
contre telle ou telle loi imposée par les partis de gouvernement. Si l'on
veut contrer leur volonté de soumission totale des universités aux
logiques du capitalisme, il faut leur opposer une pratique et un projet
qui rompent avec l'organisation actuelle de la recherche et de
l'enseignement. Le réseau No Pasaran, dans tous ses combats, a toujours
refusé de s'en tenir aux dénonciations creuses des adversaires, au profit
de pratiques de résistance et de construction d'alternatives. Nous
proposons donc ce texte au mouvement, pour qu'un débat s'ouvre sur
l'université que nous voulons vraiment.
La loi LRU : une « gouvernance » autoritaire inspirée du management.
Beaucoup de choses sont dites sur la loi Pécresse, dont pas mal
d'approximations. Ce qui est certain, c'est que cette loi modifie en
profondeur les rapports de force au sein des universités, en dotant un
Conseil d'Administration (CA) réduit et un président rééligible d’un
ensemble de pouvoirs nouveaux, au détriment des départements, des UFR et
des autres conseils : Conseil des Etudes et de la Vie Universitaire (CEVU)
et Conseil Scientifique (CS). Certains de ces pouvoirs, notamment la
possibilité pour le/a président-e d’intervenir directement dans le
recrutement et la rémunération des enseignant-e-s chercheur-e-s,
organisent la compétition interne et le clientélisme, limitant à terme les
possibilités de voix discordantes au sein des facs. Cette logique n’est
pas nouvelle : c’est celle qui prévaut dans les entreprises capitalistes,
et que les gouvernements successifs, de droite comme de gauche, veulent
importer dans les administrations publiques. Cela va évidemment avec
l'augmentation de la précarité des personnels, qui pourront être
recruté-e-s sur des contrats courts par le/a président-e de l'université,
et avec l'apparition de fonctions dont on voit mal comment elles cadrent
avec les missions universitaires, par exemple la gestion d'un portefeuille
de valeurs mobilières et immobilières. Ce qui nous est vendu comme de
l'autonomie est en fait le passage à une « gouvernance » autoritaire de
nos facs, calquée sur le fonctionnement des entreprises capitalistes.
Contre la présidentialisation, autogestion interprofessionnelle.
Evidemment, voir les universités dirigées par des président-e-s/PDG est
une perspective peu ragoûtante. Mais pour faire pièce à cette logique
autoritaire, l'abrogation de la loi LRU n’est pas suffisante :
aujourd’hui la capacité des étudiant-e-s, enseignant-e-s et BIATOSS de
contrôle et de participation directe au fonctionnement de l’université
est ridiculement faible. Les élections des conseils permettent, sous
prétexte d’investir de supposé-e-s représentant-e-s, d’en exclure
l’immense majorité des usager-e-s. Au contraire, nous voulons une
organisation autogestionnaire et interprofessionnelle de l’université, à
tous les niveaux, et le remplacement d’un système fondé sur la
représentation par une participation directe des usager-e-s à toutes les
décisions qui les concernent.
LRU, LMD, ECTS, PRES : les logiques du processus de Bologne.
Cette loi prend place dans un processus de plus long terme (dit de
Bologne), lancé en 1998 par Claude Allègre et touchant aujourd’hui 45
pays. Celui-ci poursuit deux objectifs : d’une part créer un espace
européen d’enseignement supérieur harmonisé et compétitif, et d’autre
part instaurer partout une séparation entre cursus professionnalisants et
parcours plus longs. Selon l'idéologie de Bologne, les universités –
réunies dans des « pôles d'excellence » comme les Pôles de Recherche et
d'Enseignement Supérieur (PRES) – devraient devenir des unités
économiques en compétition pour attirer des « cerveaux », et façonnées
pour fournir aux entreprises capitalistes une main d'œuvre «
professionnalisée » et corvéable à merci. Là encore, les logiques
néolibérales prévalent : soumission interne aux mécanismes du marché,
soumission externe au « marché de l’emploi », c'est-à-dire aux intérêts
des capitalistes et du patronat. Comme dans le reste du système
capitaliste/étatique, cette transformation est soutenue par un contrôle
toujours plus important de l’Etat, qui distribue les crédits et les
habilitations en fonction de la soumission à cette idéologie de chaque
université, UFR, département.
Contre la compétition organisée, coopération fédéraliste internationale.
La présentation selon laquelle les établissements d’enseignement
supérieur seraient inéluctablement en compétition relève d’un mode de
pensée néolibéral particulièrement inadapté à l’université que nous
voulons. Les universités devraient être des lieux ouverts à tou-te-s et
dans lesquels connaissances et compétences seraient librement construites
et partagées. Mais il ne faut pas s’y tromper : cette idéologie s’impose
aujourd’hui parce que les universités se pensent et se vivent trop
souvent comme des unités fermées, peu liées entre elles et peu réflexives
sur leur place dans la société. Il est nécessaire de s’opposer à l’idée
de compétition non en renforçant cette fermeture, mais par la mise en
place d’outils concrets de coordination entre universités (pour la
recherche comme pour l’enseignement), selon des principes fédéralistes,
et d’ouverture aux mondes extérieurs qui fonctionnent selon des modes
d’organisation et des valeurs non-capitalistes : mouvements sociaux,
services publics, milieux alternatifs. C'est seulement ainsi que
l'ouverture des universités, tant réclamée par les un-e-s et les autres,
pourra prendre un sens réellement émancipateur pour ses usager-e-s.
Autonomie, pouvoir des entreprises, pouvoir de l’Etat.
La dénonciation habituelle de désengagement de l’Etat est trompeuse :
l’Etat est au contraire plus intrusif que jamais. Par les réformes
Licence/Master/Doctorat (LMD) et le contrôle des maquettes, c'est-à-dire
des enseignement proposés aux étudiant-e-s, l'Etat tente de formater tous
les cursus ; par la création de l’Agence Nationale de la Recherche (ANR)
et le démantèlement progressif du Centre National de la Recherche
Scientifique (CNRS), il soumet les chercheur-e-s à des priorités définies
nationalement par des personnes nommées par le gouvernement, et augmente
la précarité et la compétition entre chercheur-e-s. Quant au contrôle
direct des entreprises sur les universités, c’est une hypothèse peu
probable : l’existence en France d’un enseignement supérieur divisé entre
université et grandes écoles fait que les facs ne risquent pas d’attirer
les fonds du CAC 40. Mais c'est un risque toujours présent, et que la loi
Précresse accentue. Le problème est qu'aujourd'hui il est nécessaire de
se battre à la fois contre les tentatives étatiques et capitalistes de
soumettre les universités à leur volonté. Ce combat est d'autant plus
difficile qu'aujourd'hui l'Etat montre clairement qu'il soutient les
intérêts des firmes capitalistes contre ceux des travailleurs/euses, à
l'université comme dans le reste de la société.
Contre la tutelle de l’Etat et la mainmise du capital, service social de
l’enseignement.
L’alternative qu’on nous présente entre financement par l’Etat et
financement privé est aveuglante, au point d'amener le mouvement contre
la loi LRU à en appeler à l’Etat pour nous protéger des entreprises. Mais
de la même manière qu’il serait illusoire de penser que les capitalistes
pourraient nous filer de l’argent sans rien demander en échange, il est
singulièrement naïf de croire en une université libre financée par un
Etat toujours plus autoritaire et intrusif. Ce débat dissimule tous les
autres modes de financement public, en vigueur par exemple dans les
systèmes d’assurance sociale comme la Sécu, et qui permettent une gestion
par les personnes concernées (malheureusement pas toutes, et selon une
répartition inéquitable des pouvoirs entre « partenaires sociaux », dans
la Sécurité sociale actuelle). Pour réaliser l’autogestion et faire du
système d’enseignement supérieur et de recherche un outil de
transformation sociale, et non plus le bras intellectuel d'un Etat
décidemment engagé au côté des capitalistes et du patronat, il est
impératif de creuser dans cette voie et de réfléchir ensemble à un projet
de financement exclusivement public et entièrement indépendant de
l'ingérence étatique (mutualisme, cotisations sociales etc).
Les universités dans le système d’enseignement supérieur français et
européen.
La lutte pour la définition de l’avenir du système d’enseignement
supérieur et de recherche dépasse les frontières de l’université. Si le
processus de Bologne aboutit effectivement à un système universitaire à
deux vitesses, l’enseignement supérieur français est déjà fortement
cloisonné : les classes prépas et les grandes écoles sont aujourd'hui les
lieux quasi-exclusifs de formation des futures élites de l’Etat et du
capitalisme. Au niveau européen, la mobilité voulue par Bologne est là
aussi un outil à la disposition exclusive des étudiant-e-s les mieux
doté-e-s économiquement, socialement, culturellement. Et la machine à
exclure ne commence pas après le baccalauréat : dès le collège, le
système de reproduction et de légitimation de la hiérarchie sociale
élimine par étape les futur-e-s exploité-e-s de la compétition pour les
meilleures places d’exploiteurs/ses. Il faut donc se battre sans relâche
contre toutes les formes de hiérarchisation des cursus, du primaire au
supérieur.
Contre les boîtes à élites, enseignement polytechnique pour tou-te-s.
Les universités sont aujourd'hui insérées dans un système d'enseignement
supérieur qui les relègue à une position subalterne : sous-financement
chronique, masse d'étudiant-e-s dépossédé-e-s de tout contrôle de leur
cursus, diplômes dévalorisés par les recruteurs/euses des firmes
capitalistes. C'est pourquoi il est nécessaire de poser les bases d’une
lutte contre la coexistence des facs et de filières sélectives dans
lesquelles l’immense majorité des dirigeant-e-s seront recruté-e-s. Mais
cette lutte, pour ne pas être vaine, doit permettre de récupérer des
prépas et des grandes écoles les dispositifs qui font leur intérêt et
leur force : beaucoup de moyens matériels et un haut taux d’encadrement,
une pluridisciplinarité durant les deux années qui suivent le bac, etc.
La professionnalisation qu’on tente de nous vendre est démentie par le
généralisme du cursus des élites : à nous d’inventer, par un enseignement
polytechnique pour tou-te-s pendant les premières années de formation,
les moyens de dépasser la ségrégation intellectuels/manuels si centrale
au système de domination économique. L’université que nous voulons,
ouverte à tou-te-s, quel que soit l’âge, la position sociale, le parcours
précédent, est possible si l’on se débarrasse du système intrinsèquement
hiérarchique des prépas/grandes écoles.
Révolution universitaire et révolution sociale.
Non, le combat actuel des étudiant-e-s, enseignant-e-s et BIATOSS n'est
pas perdu d'avance, si l'on évite les pièges tendus par le gouvernement.
S'en tenir à des revendications limitées aux réformes en cours, c'est se
condamner à les subir, sous des formes au mieux diluées, dans les années
à venir, et à s'interdire de devenir les acteurs/trices d'un changement
radical et émancipateur du fonctionnement des universités. C'est
seulement en mettant en place, dans toutes les facs, des espaces de
construction de l'autogestion, que l'on pourra imposer l'université que
nous voulons, débarrassée de la tutelle du gouvernement et des
entreprises capitalistes. Expérimenter, dès aujourd'hui, une nouvelle
manière de vivre ensemble dans les facs, c'est participer à la
construction de la nécessaire rupture avec le capitalisme et
l’autoritarisme. Cette rupture ne commence ni ne finit dans les
universités elles-mêmes : elle passe par le développement dans toute la
société de services publics gratuits et autogérés, permettant à chacun-e
de se voir garantir les moyens de mener une vie librement choisie dans
des conditions décentes. Mais en tant qu’espaces propices au
développement de logiques non-marchandes, les facs ont un rôle à jouer :
au mouvement actuel de se les approprier, et d’en faire les lieux de vie
et de lutte qu’elles peuvent et qu’elles doivent être, pour participer à
la construction d’une véritable révolution sociale et libertaire !
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