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Article du monde par des profs de paris 8

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Message  Mulette Mer 21 Nov - 3:27

Les présidents d'université ne parlent pas en notre nom
LE MONDE | 19.11.07 | 14h30


Depuis le début du mouvement étudiant contre la loi réformant les universités,
dite loi Pécresse, il est frappant de constater à quel point est massivement
présente, dans les témoignages recueillis par les journalistes, la parole des
présidents d'université. Etant admis qu'une communauté universitaire comprend
pour l'essentiel trois composantes (étudiants, enseignants et personnels
administratifs), tout se passe comme si, pour connaître l'avis des deux
dernières catégories, le seul avis des présidents d'université suffisait.


Certes, ceux-ci sont élus parmi leurs pairs enseignants, mais la légitimité de
l'élection n'en fait pas pour autant les uniques représentants des centaines
d'enseignants et de membres du personnel de chaque université. Et ce, d'autant
moins que la loi en question est un curieux hybride d'idéologie néolibérale et
d'aspirations dominantes au sein de la Conférence des présidents d'université
(CPU), qui ne datent pas de l'élection de Nicolas Sarkozy et qui sont partagées
par des présidents de bords politiques différents, la fonction tendant à
transformer la personne.


Or, au-delà de tous les risques déjà dénoncés (paupérisation de certaines
universités, désengagement financier de l'Etat, remise en cause des statuts de
certains personnels par l'extension du domaine de la contractualisation, etc.),
la nouvelle loi conduit à un renforcement sans limite des prérogatives des
présidents, que ceux-ci se gardent bien de contester.


Assez curieusement ceux-là même qui se plaisent à rappeler à tout instant - y
compris dans l'étonnant éditorial du Monde du 14 novembre - l'approbation de la
nouvelle loi par la CPU se gardent bien de la mettre en rapport avec les
nouveaux pouvoirs conférés aux présidents par la loi Pécresse. Pour comprendre
les enjeux de cette affaire, il vaudrait mieux d'ailleurs éviter de postuler un
conflit caricatural opposant les modernes et dynamiques partisans de la réforme
aux opposants archaïques, empêtrés dans l'immobilisme.


Or, il convient de rappeler que la nouvelle loi ne se justifie en rien par la
nécessité de dépasser un régime d'assemblée anarchique, qui interdirait les
décisions claires. Avant même son vote, les institutions des universités
françaises étaient déjà affectées par un fort tropisme "présidentialiste". A
titre indicatif, le président n'était en rien responsable devant les conseils
centraux de l'université et, en cas de conflit sérieux, la seule arme qui
demeurait au conseil d'administration était de refuser de voter le budget annuel
(faisant ainsi courir à la communauté le risque d'une administration rectorale
directe). Si le conflit ne trouvait pas de solution, le seul espoir était une
démission présidentielle, puisque aucun type de vote de défiance ou de mise en
minorité ne pouvait conduire à une remise en cause du pouvoir attribué le jour
de l'élection. Les seules limites à ce pouvoir tenaient à ce qu'il allait de soi
qu'un certain nombre de domaines ne relevaient pas du champ d'action du
président, notamment pour le recrutement des enseignants, et que la
responsabilité de la politique scientifique de l'établissement était largement
partagée avec le conseil scientifique.


Ces fragiles garde-fous disparaissent avec la nouvelle loi : le conseil
d'administration perd toute possibilité de refuser le budget et le champ des
prérogatives présidentielles s'accroît considérablement (y compris pour les
recrutements d'enseignants), comme si l'hyperprésidence sarkozyste constituait
un nouveau modèle pour toutes les hiérarchies sociales et pour toutes les formes
de gouvernance.


Cette loi rend possible - tout dépendra de la personne appelée à occuper ces
fonctions - une forme de despotisme présidentiel dont on peut craindre qu'il ne
soit pas toujours éclairé. Ce faisant, se développeront symétriquement, à des
degrés inconnus jusqu'alors, une concentration de tous les pouvoirs entre les
mains d'un nombre de personnes extrêmement limité et, partant, d'inévitables
pratiques de clientélisme.


La politique scientifique des établissements risque d'en être profondément
affectée, car nous aurons alors affaire à une nouvelle université où la
possibilité d'un développement de tous les types de recherches sera soumise aux
décisions des mêmes individus, pour le plus grand malheur de la pensée critique.


Il est fondamental que les universitaires affirment que ce combat contre la loi
votée en août dans la précipitation est aussi le leur. Il est urgent que les
organes de direction prennent clairement position contre elle, comme l'ont fait
à plusieurs reprises le président et les instances élues de l'Université
Paris-VIII à laquelle nous appartenons. Il serait bon que les rares présidents
qui ne veulent pas de ce surcroît de prérogatives et en mesurent les dangers le
disent clairement. Il faut enfin que les enseignants et les membres du personnel
s'organisent pour faire entendre leur voix et pour dire que les déclarations des
présidents d'université et les communiqués de la CPU ne traduisent pas ce que
beaucoup d'entre nous pensent de cette loi. Bref, il faut faire savoir que
certains ne parlent pas et ne parleront pas en notre nom.
------------------------------------------------------------------------


Pierre Bayard, Denis Bertrand, Alain Brossat, Martine Créac'h, Françoise
Crémoux, Jean-Louis Déotte, Jean-Louis Fournel, Bertrand Guillarme, Serban
Ionescu, Tiphaine Samoyault, Mireille Séguysont enseignants de l'université
Paris-VIII Vincennes-Saint-Denis.


Article paru dans l'édition du 20.11.07

Mulette

Messages : 34
Date d'inscription : 14/11/2007

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